La relance du secteur reste tributaire de plusieurs questions comme les aides au logement qui se font attendre, ou l’indécision des ménages qui repoussent leur décision d’achat. La demande, déjà exsangue, souffrira davantage du fait de la hausse des taux immobiliers, et les grandes immobilières cotées pourraient connaître un léger effet négatif sur leurs dettes à taux révisables cette année.
Le secteur immobilier a connu une année 2022 fortement perturbée en bourse. Alors que les derniers chiffres à fin septembre pour les trois immobilières cotées laissent entrevoir une amélioration des revenus, ces dernières ont évolué dans une situation tendue en 2022 et qui se poursuivra en 2023.
L’indice des immobilières en bourse lâchait 27,15% en 2022 dans un contexte inflationniste fort, où certains chantiers ont été mis à l’arrêt du fait de la flambée des coûts des matières premières (ciments, rond à béton, carburant, verre, etc.).
Néanmoins, Alliances a fait exception en 2022 en bourse avec une forte progression de 40,6%. Un bon comportement boursier poussé par différents facteurs, notamment la forte progression du RNPG à fin juin (+77%), la sortie de l’actionnaire SFI et le plan de restructuration du groupe. Un analyste confiait au sujet de la valeur en 2022 que “cette immobilière a pu rassurer le marché grâce notamment à ses bonnes réalisations en 2021 et au premier trimestre de cette année. Les investisseurs, en particulier les petits porteurs, ont beaucoup misé sur cette valeur, surtout pendant la phase d’optimisme qu’a connue le marché au premier trimestre de l’année. La valeur avait beaucoup pris pendant cette période. Les investisseurs avaient du cash et cherchaient où créer l’opportunité”.
Depuis le début de l’année 2023, l’indice des immobilières a lâché 6,72% à l’ouverture de la séance du 16 janvier. Toutes les valeurs affichent un retrait depuis le 2 janvier. Et pour cause, le contexte dans lequel évoluent les immobilières est pour le moins tendu cette année.
La hausse des taux favorisera le retrait de la demande
L’inflation, qui a rogné le pouvoir d’achat des ménages en 2022, poursuivra sa tendance cette année. Certes de manière moins forte, mais le niveau d’inflation demeurera bien supérieur à celui de 2021.
Et cette année, la hausse des taux viendra entamer encore plus le pouvoir d’achat des ménages. Contactée, une source de la place nous explique que “le contexte n’est pas favorable avec cette hausse des taux. Cela va encore plus rogner sur la demande du fait que la hausse du taux directeur viendra se répercuter sur les niveaux des taux immobiliers”.
Bachir Benslimane Bellemlih, PDG d’Afdal.ma, comparateur en ligne de crédits immobiliers au Maroc, nous confiait dans un précédent article que la hausse était inévitable. “Nous prévoyons en effet des taux de crédit autour de 4,3% en moyenne en janvier 2023, et pouvant aller jusqu’à 4,4 % dans certains établissements bancaires. Cela devrait continuer à grimper au cours de l’année 2023. Nous estimons que la barre des 4,5 % devrait être rapidement dépassée. Et celle des 4,7 % pourrait être approchée au cours de l’année.”
Tout cela intervient dans un cadre où la confiance des ménages a atteint un plus bas historique en 2022, selon les derniers chiffres du haut-commissariat au Plan (HCP). Ces derniers font notamment ressortir que la moitié des ménages s’attendaient à une dégradation de leurs conditions de vie dans les douze prochains mois.
Outre l’impact sur les ménages, notre interlocuteur indique que cette hausse de taux jouera potentiellement un rôle sur les dettes importantes détenues à taux révisables par les immobilières cotées. “Il se peut que cet impact ne soit pas significatif en soi, mais il existera. Il faut observer auprès de chaque société immobilière cotée la part de leur dette qui est à taux révisable et, à partir de là, l’impact pourra être calculé. Car avec une hausse de 100 pbs du taux directeur, il est clair que les taux vont grimper, et donc alourdir l’intérêt de la dette”, explique le groupe.
Une incertitude renforcée autour de la question des aides au logement
En plus de cela, un marasme règne, entretenu par l’attente tant du côté vendeur que du côté acheteur, autour de l’aide financière publique directe pour les primo-accédants. Alors que certains promoteurs temporisent quant au lancement de leurs chantiers, les ménages, eux, retardent leur décision d’achat en attendant de connaître le montant de cette aide. In fine, peu de choses se passent sur le marché.
“Avant, les promoteurs mettaient sur le marché des logements sociaux défiscalisés et recevaient, en contrepartie, la TVA de l’Etat. Désormais, l’Etat annonce que les logements sociaux sont à 300.000 dirhams et qu’ils seront fiscalisés. Vous devez donc à la fois payer la TVA et l’IS et, de l’autre côté, une aide sera versée aux ménages. Mais cela rapporte moins qu’avant quand ces biens étaient défiscalisés. Or les intrants ont augmenté, le foncier est devenu plus cher… Il y a un souci de logique”, s’inquiète un professionnel de l’immobilier.
Sur le sujet de la hausse des coûts, le vice-président de la FNPI, Anice Benjelloun, confiait à LeBoursier, fin novembre 2022, qu'”un logement à vendre à 300.000 dirhams TTC, cela signifie 254.000 dirhams HT. De plus, nous devrons payer une panoplie d’impôts ! Les impôts communaux, les régies, l’enregistrement, la conservation foncière, la protection civile, l’IS… Ça tournerait autour de 45.000 dirhams. Cela veut dire que l’on devrait vendre moins cher que les 250.000 dirhams actuels. C’est difficilement réalisable”.
Interrogée peu après la mi-décembre sur le sujet, la ministre de l’Habitat, Fatima-Zahra Mansouri, annonçait que le décret et les modalités de cette aide financière publique pour les primo-accédants seraient dévoilés en janvier.
Source: www.medias24.com, article du 16/01/2023 .